La SNCF songe à supprimer des dessertes pour ses TGV en 2011
Confrontée à la chute de la profitabilité de ses TGV, la SNCF veut revoir en profondeur ses dessertes dès la fin 2010. Certains axes sont examinés à la loupe et pourraient voir leur offre réduite, comme
Paris-Arras, Lille-Strasbourg ou
encore Nantes-Strasbourg et Bordeaux-Strasbourg.
Renaud Honoré sur
LesEchos du 18/1/2010 –
p. 26
L’affaire semble entendue: l’âge d’or
financier du TGV est bel et bien révolu. Le budget 2010 de la SNCF – qui doit
être examinémercredi par le conseil d’administration de la compagnie
ferroviaire –marque à ce titre un tournant («Les Echos» du 12 janvier): la
branche grandes lignes SNCF Voyages, jusqu’alors vache à lait du groupe public,
devrait voir sa rentabilité s’effondrer cette année, avec un taux de marge
opérationnelle tombant à 10,2 %, contre 20,1 % il y a seulement deux ans.
Ce revers de fortune oblige la compagnie ferroviaire à revoir sérieusement sonmodèle économique. Si bien que certaines lignes non rentables sont désormais clairement menacées, et ce dès 2011. Selon nos informations, la SNCF étudie actuellement une refonte profonde de son offre, ce qui pourrait se traduire par la suppression ou une forte réduction de l’offre sur certaines dessertes. Les orientations définitives doivent être prises au printemps, afin que ces changements soient mis en application en décembre prochain, lors du passage au service d’hiver de 2011.
Le groupe public a
déjà commencé à préparer le terrain. Face à la violence de la crise (le chiffre
d’affaires de la branche a reculé de 1,4 % en 2009, contre une croissance de 8
% l’année précédente), des premières mesures ont été prises il y a
quelquesmois. Le nombre de trains a été réduit dans les périodes précédant
ousuivant les heures de pointe, afin de mieux remplir les rames pendant les
périodes les plus chargées. Certaines liaisons ont également été allégées,
comme le Rouen-Lyon qui a déjà perdu deux TGV le week-end.
Certaines lignes dans
le viseur
Mais la refonte
envisagée s’annonce bien plus importante. L’objectif est d’obtenir «une
réduction significative du déficit (60 à 80 millions d’euros) générée par
certaines relations», explique une source proche du dossier. Avec la crise
et la hausse des péages payés pour faire circuler les trains, «environ 20 %
des TGV génèrent d’ores et déjà des pertes, et ce taux pourrait monter à 30 %
l’an prochain», selon un expert. Certaines lignes – notamment celles
reliant des régions entre elles sans passer par Paris – sont clairement dans le
viseur, comme le Paris-Arras, les axes Nord-Est (Lille-Strasbourg par exemple)
et Est-Atlantique (Bordeaux-Strasbourg et Nantes-Strasbourg). L’offre pourrait
y être nettement réduite. Au minimum.
La crise pose un
autre problème inédit au groupe: elle se retrouve avec beaucoup trop de TGV !
Le taux d’occupation record de 77 % des rames atteint en 2008 est en effet sur
une pente savonneuse. L’année 2009 a déjà été marquée par une baisse sensible,
qui fait que ce pourcentage devrait diminuer sans doute jusqu’à un niveau
approchant les 75 %. Les prévisions ne laissent augurer rien de meilleur pour
la suite: la SNCF table en 2010 sur une baisse de 3,6 % du nombre de voyageurs
transportés par ses trains grandes lignes (TGV et Corail).
Les voyageurs se font
donc plus rares, au moment même où la compagnie va être livrée de TGV commandés
il y a quelques années, lors de la période faste du début des années 2000.
Ainsi 15 nouvelles rames à deux niveaux vont être mises en service commercial.
C’est beaucoup dans le contexte actuel. Si bien que t3 rames de la ligne
sud-est (vers Lyon etMarseille) vont devoir être immobilisées – «garées», dans
le vocabulaire cheminot – cette année. Il s’agit d’une première dans l’histoire
du TGV, qui a bâti toute sa stratégie sur une politique de volumes depuis
quinze ans.